Le 9 août 48 av. J.-C., deux armées massives se faisaient face. D’un côté, Gnaeus Pompeius Magnus (également connu sous le nom de Pompée le Grand) commandait une armée comptant jusqu’à 52 000 soldats. Ils occupaient une position avantageuse en hauteur et avaient l’avantage numérique sur leur rival. En face d’eux se trouvait l’armée de Caius Julius César, en infériorité numérique de deux pour un.
Ce qui suivit serait l’un des jours les plus sanglants de l’histoire romaine, alors que des compatriotes nationaux se tuaient les uns les autres, et que les deux généraux, autrefois amis, cherchaient à enfoncer un dernier clou dans le cercueil de l’autre. Le résultat de la bataille de Pharsale, à l’extrémité sud de la plaine thessalienne en Grèce, allait déterminer l’avenir de Rome.
Contexte de la bataille de Pharsale
À l’époque de la République romaine, Rome était traditionnellement dirigée par deux consuls, avec un pouvoir considérable également entre les mains du Sénat. En 60 av. J.-C., Rome était de facto dirigée par un triumvirat. Le consulat était aux mains de trois hommes extrêmement puissants : Gnaeus Pompeius Magnus, Marcus Licinius Crassus et Julius César.
Cependant, l’alliance ne durerait pas longtemps, car l’ambition politique et les aléas de la fortune changèrent la dynamique des relations entre ces trois consuls. En 54 av. J.-C., selon l’historien romain Sénèque, Jules César se trouvait en Grande-Bretagne lorsqu’il apprit la nouvelle de la mort de sa fille Julia, l’épouse de Pompée, morte en donnant naissance.
La conquête de la Gaule par César et ses liens familiaux avec Pompée avaient permis de maintenir les deux hommes unis, mais avec la fin de la campagne gauloise et la mort de Julia, il n’y avait plus rien pour empêcher les désaccords de se transformer en luttes à mort entre les deux consuls.
Un an plus tard, Crassus fut écarté de la lutte pour le pouvoir lorsqu’il fut tué à la bataille de Carrhes, aux bords orientaux de la République romaine.
Avec une force puissante composée de nombreuses légions sous son commandement, César était bien positionné pour prendre le contrôle de Rome par la force, et à la fin de sa campagne, le Sénat se retrouva à débattre sur la manière de le réintégrer dans la scène politique romaine, d’autant plus que sa victoire lui avait conféré une popularité incroyable auprès de la population.
De 55 av. J.-C. à 52 av. J.-C., un effondrement de l’ordre alimenté par des tensions politiques causa l’anarchie dans certaines parties de la ville de Rome. Pompée consacra beaucoup de temps et d’efforts à répondre à ces défis. Le casus belli pour Julius César, cependant, survint lorsque le Sénat élut Pompée comme seul consul et planifia de retirer les légions de César.
Ce mouvement fut trop pour César, et à partir de ce moment-là, la guerre devint inévitable. Ni Pompée ni César ne voulaient aller en guerre l’un contre l’autre, mais l’orgueil personnel et le climat politique les propulsèrent vers un tourbillon de conflit inévitable.
La guerre
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En janvier 49 av. J.-C., Julius César et ses légions envahirent l’Italie, qui était mal préparée pour une telle entreprise. César rencontra un triomphe facile et s’entretint avec Pompée sur le choix de la prochaine action à mener. Les accords entre les deux échouèrent et la guerre continua. Alors que les légions de César remportaient des victoires dans la péninsule italienne, Pompée fut contraint de se retirer et de chercher la victoire ailleurs.
César se rendit alors en Espagne pour prendre le contrôle de la province qui était sous le consulat de Pompée. Il remporta plusieurs victoires contre les forces pompéiennes et prit le contrôle de la province avant de retourner à Rome, où il fut nommé dictateur, ce qui lui conféra un pouvoir bien plus grand que celui de consul.
Avec l’Espagne soumise, César chercha à mettre fin à Pompée en le poursuivant à travers l’Adriatique, entamant ainsi la campagne macédonienne contre les forces directement contrôlées par Pompée.
Traverser l’Adriatique était une manœuvre risquée, et une flotte sous le contrôle de l’allié de Pompée, Marcus Calpurnius Bibulus, réussit à capturer de nombreux transports de César revenant à Brundisium, sur la côte est de l’Italie.
César se retrouva ainsi coincé sur la côte ouest de l’Adriatique avec seulement sept légions et des ressources limitées. S’il ne parvenait pas à vaincre Pompée là, toute la guerre serait perdue. Cependant, il fut plus tard renforcé par une autre légion, bien qu’il fût encore largement dépassé en nombre par les forces de Pompée.
La campagne ne démarra pas bien pour César, et il échoua à sécuriser la ville d’approvisionnement vitale de Dyrrachium contre les forces de Pompée. César fut contraint de se retirer de Thessalie, et sa situation devint critique.
Pompée décida de terminer la guerre et d’utiliser sa position supérieure et son avantage numérique pour infliger une défaite écrasante à César. Il rejoignit des renforts venus de Syrie et força César à se battre.
Pharsale
Le 9 août, les deux armées se rencontrèrent à l’extrémité sud de la plaine de Pharsale en Thessalie. Selon le récit de César lui-même, il disposait de 22 000 hommes, dont environ 1 000 cavaliers. En face de lui, les estimations des forces de Pompée varient selon les sources historiques, allant de 36 000 à 45 000 fantassins, renforcés par environ 7 000 cavaliers, donnant à Pompée un avantage de deux pour un.
Les deux généraux déployèrent leur armée avec une rivière protégeant leur flanc. Pour César, la rivière Énipeus protégeait son flanc gauche, tandis que pour Pompée, elle protégeait son flanc droit. Les deux généraux disposèrent leurs cavaleries face à face sur l’autre flanc.
La cavalerie de Pompée, largement supérieure en nombre, était renforcée par pratiquement l’ensemble de l’armée de tirailleurs, archers et frondeurs. Cela donna à Pompée un avantage massif sur son flanc gauche, où il comptait affaiblir puis dérouler le flanc droit de César. C’est aussi de cet endroit que Pompée se positionna pour s’assurer que cette partie essentielle de sa stratégie se déroulerait comme prévu. De l’extrême gauche de César à sa droite, ses généraux Marc Antoine, Domitius et Faustus Cornelius Sulla (le fils de Lucius Cornelius Sulla) prirent position. César se plaça avec Sulla sur la droite.
Les légions de César, sévèrement inférieures en nombre, furent disposées en trois lignes seulement (sections), six hommes de profondeur. Lorsque César aperçut la taille de l’armée de Pompée, en particulier la cavalerie, il ordonna d’amincir ses lignes pour créer une quatrième ligne, destinée à soutenir sa cavalerie qui n’aurait aucune chance face à une supériorité de sept contre un de la part de l’ennemi.
César était loin d’être confiant, mais ses troupes, aguerries au combat, ne céderaient pas facilement.
Les deux armées restèrent immobiles, attendant que l’autre fasse le premier mouvement. Pompée contrôlait l’initiative et César fut forcé de donner l’ordre à son armée d’avancer en premier. Son flanc gauche, sous Marc Antoine, et le centre, sous Domitius, avancèrent en bon ordre et engagèrent le flanc droit et le centre de Pompée.
En face du flanc droit de César, la cavalerie de Pompée avança et commença l’attaque. Le flanc droit de César commença à reculer, et les troupes montées de Pompée se détachèrent en sections pour se préparer à contourner le flanc droit de César.
Leur succès fut de courte durée, car la quatrième ligne de César reçut l’ordre d’attaquer la cavalerie de Pompée. Leur assaut fut furieux au-delà de toute attente, et la cavalerie pompéienne, choquée par l’attaque, commença à se retirer sous la pression. La quatrième ligne pressa son avantage, et les archers et frondeurs de Pompée, sans soutien de leur cavalerie fuyant, furent réduits en pièces.
Une fois le succès de la quatrième ligne assuré, César ordonna à la troisième ligne, sous le commandement de Sulla, d’avancer, fournissant un soutien vital aux premières et deuxièmes lignes, qui étaient maintenant épuisées.
L’effondrement du flanc gauche de Pompée, cependant, plongea ses forces dans le désespoir, et la bataille ne dura pas beaucoup plus longtemps, car elles commencèrent à quitter le champ de bataille plutôt que de subir l’encerclement de leur flanc gauche sous l’avancée efficace de la quatrième ligne de César.
Pompée quitta le champ de bataille et ses forces fuirent vers la sécurité de leur camp. Les légions de César les suivirent et attaquèrent le camp, forçant les troupes de Pompée plus haut dans la montagne. Sans espoir de répit ni d’eau, elles jetèrent leurs armes et se rendirent.
Selon le récit de César lui-même, il fit preuve de clémence envers ces soldats épuisés et les pardonna tous.
Après la bataille
Pompée s’enfuit vers le port de Larisa avec un petit nombre d’hommes et monta à bord d’un transport. Il espérait rallier des soutiens de l’autre côté de la Méditerranée, et bien que la guerre dura encore trois ans, Pompée ne vécut pas pour en être témoin. Il se dirigea vers Peluse, sur la côte égyptienne, espérant obtenir le soutien de son ancien client, Ptolémée XIII Théos Philopator, le roi d’Égypte. Cependant, ses attentes furent récompensées par la traîtrise, et il fut abattu lorsqu’il posa le pied à terre.
Bien que la bataille de Pharsale n’ait pas mis fin à la guerre, elle fut une victoire décisive et légitimait le pouvoir de César. Jusqu’à cette bataille, la majeure partie du monde romain soutenait Pompée, mais après la victoire de César et l’assassinat de Pompée, il ne fallut plus beaucoup de temps avant que le soutien aux pompéiens ne s’effondre complètement.
Le bilan des pertes était totalement disproportionné. Selon César, il n’aurait perdu que 200 soldats, mais ce chiffre est probablement plus proche de mille. Ceux qui combattaient aux côtés de Pompée, en revanche, ont subi des pertes estimées entre 6 000 et 15 000 tués, et environ 24 000 capturés.
Conclusion
Pharsale fut une grande victoire pour César et elle servit de fondation militaire à partir de laquelle il put affirmer son pouvoir sur la République. Malgré cela, le 9 août 48 avant J.-C. fut un triste jour pour Rome, car des légions s’opposaient à d’autres légions dans un épisode de massacre fraternel.