La Sédition Nika (également connue sous le nom de révolte de Nika ou de soulèvement de Nika) est un événement important qui s’est déroulé à Constantinople en 532 après J.-C., sous le règne de l’empereur romain Justinien Ier. Cette révolte éclata en raison des tensions politiques et sociales croissantes entre les deux principales factions du cirque — les Bleus et les Verts. Cependant, la mauvaise gestion de la situation par Justinien et son refus de prendre la menace au sérieux transformèrent ces troubles en une rébellion à grande échelle.
Pendant cinq jours, Constantinople sombra dans le chaos, ravagée par un incendie dévastateur. Ce n’est que grâce à l’intervention de l’impératrice Théodora que Justinien prit finalement une décision. Il ordonna alors à l’armée d’intervenir dans l’hippodrome, entraînant un massacre sans précédent dans l’histoire romaine. Malgré les lourdes pertes civiles, Justinien exploita la sédition Nika pour éliminer ses rivaux, consolider son pouvoir et écraser définitivement l’influence des factions du cirque.
Le nom « Nika » (qui signifie « victoire » en grec) vient du cri de ralliement des insurgés dans l’Hippodrome de Constantinople.
Le Début de l’Émeute dans l’Hippodrome de Constantinople
L’émeute de Nika éclata dans l’hippodrome de Constantinople, la capitale de l’Empire romain d’Orient (également appelé Empire byzantin). Après l’exécution ratée de deux membres des factions du cirque arrêtés pour meurtre, les Bleus et les Verts demandèrent à l’empereur Justinien d’accorder sa clémence.
Celui-ci se contenta de commuer la peine en emprisonnement, sans pour autant gracier les accusés. Cependant, l’empereur était absorbé par des affaires plus urgentes : il négociait la paix avec l’ennemi juré de Rome, l’Empire sassanide, et se préparait à un événement majeur — les courses de chars à l’hippodrome.
Le lendemain, le 13 janvier 532, le peuple se rassembla dans l’enceinte de l’hippodrome et implora une nouvelle fois l’empereur d’accéder à leur demande, sans succès.
Un Chant Célèbre Déclenche la Sédition
Le refus de Justinien de satisfaire les revendications des factions entraîna un événement sans précédent dans l’histoire de l’Empire romain. Les Bleus et les Verts, pourtant habitués à s’affronter, conclurent une alliance inattendue. D’une seule voix, la foule entonna alors un chant retentissant : « Nika ! » (signifiant « victoire » ou « conquérir » en grec). Ce cri, habituellement réservé aux encouragements des auriges durant les courses de chars, fut cette fois dirigé contre l’empereur lui-même.
Face à cette colère populaire grandissante, Justinien et sa cour se réfugièrent précipitamment dans le kathisma, la loge impériale, avant de se retirer derrière les murs du Grand Palais. Leur fuite ne fit qu’encourager la rébellion. En quelques heures, la foule enragée investit les rues de Constantinople, marquant le début de l’un des épisodes les plus violents de l’histoire byzantine.
L’Émeute de Nika Dévaste la Capitale Impériale
La foule en colère attaqua d’abord le prétoire, où se trouvait la prison, libérant les détenus et incendiant le bâtiment. Le lendemain, le 14 janvier, Justinien retourna à l’hippodrome dans une ultime tentative pour négocier avec les émeutiers. Il alla jusqu’à accepter certaines revendications et limogea deux hauts fonctionnaires impopulaires : le préfet Jean le Cappadocien et le questeur Tribonien. Pourtant, cela ne suffit pas à apaiser la sédition.
Assiégé dans le Grand Palais, l’empereur était impuissant tandis que la foule semait la destruction dans toute la ville. Un incendie colossal ravagea la capitale, réduisant en cendres certains des édifices les plus prestigieux, notamment la Curie (la maison du Sénat) et l’ancienne église Sainte-Sophie, construite sous l’empereur Théodose.
La Sédition Devient une Rébellion
Bien qu’il fût empereur, Justinien faisait face à une forte opposition de la noblesse et du Sénat de Constantinople. Son oncle Justin Ier n’avait jamais été le choix favori de l’aristocratie, qui préférait un candidat non militaire. Lui et Justinien, issus de milieux modestes, avaient gravi les échelons grâce à l’armée, ce qui attisait le mépris des élites.
De plus, Justinien s’était attiré l’hostilité de l’aristocratie en modifiant la loi pour épouser Théodora, une ancienne actrice de basse extraction, qui devint rapidement la deuxième personnalité la plus puissante de l’Empire. Pour financer ses campagnes militaires, l’empereur frappa également les riches de nouvelles taxes impopulaires.
Ainsi, lorsque l’émeute éclata, la noblesse profita du chaos pour tenter de renverser Justinien et Théodora. Leur candidat au trône était Hypatios, neveu de l’ancien empereur Anastase Ier. Initialement réticent, Hypatios finit par accepter la couronne. Mais une fois la rébellion écrasée, il en paya le prix ultime : sa propre exécution.
L’Impératrice Théodora Sauve le Trône de Justinien
Incapable d’arrêter la sédition, Justinien envisagea de fuir Constantinople. Selon l’historien Procope, c’est alors que l’impératrice Théodora prit la parole et réprimanda son mari, prononçant une phrase mémorable :
« La pourpre est un beau linceul pour mourir. »
Ce discours aurait convaincu l’empereur de rester et de lutter. Toutefois, il est également possible que son projet de fuite ait été une manœuvre stratégique, destinée à éloigner le pouvoir impérial de la répression imminente. En effet, à ce moment-là, la garnison de Thrace était arrivée à Constantinople et attendait l’ordre d’intervenir.
L’Émeute de Nika Se Termine dans un Bain de Sang
Revigoré par le discours de Théodora, Justinien décida de reprendre le contrôle. Le 18 janvier, il confia le commandement des troupes aux généraux Bélisaire et Mundus, avec pour mission d’écraser la rébellion.
L’hippodrome, où la sédition avait éclaté, devint le théâtre de son anéantissement. Les soldats scellèrent toutes les sorties, piégeant la foule à l’intérieur. S’ensuivit un massacre aveugle. À la fin de la journée, environ 30 000 personnes gisaient mortes.
Les meneurs furent ensuite exécutés, y compris Hypatios, qui fut mis à mort sur ordre de l’empereur.
Après l’échec de la sédition Nika, le pouvoir des factions du cirque fut définitivement écrasé. Les Verts et les Bleus ne conservèrent qu’un rôle cérémoniel, sans influence politique. Désormais assuré de son autorité, Justinien se concentra sur la reconstruction de Constantinople et sur son grand projet : la Reconquête de l’Occident romain.